|
[Charles Maignen]
|
|
LE CHRIST EST-IL VRAIMENT ROI DES NATIONS ?
Le révérend père Charles MAIGNEN Frère de Saint-Vincent-de-Paul Auteur
de l’opuscule « la
souveraineté du peuple est une hérésie. » Nous voudrions apporter notre contribution au
débat sur la forme de la constitution européenne par le rappel de quelques
principes et vérités élémentaires. Le
père Charles Maignen dans une étude sur la souveraineté populaire aborde une
question qui intéresse tous les juristes et surtout bien sûr les juristes
catholiques. Le
dogme de la souveraineté du peuple n'est plus remis en question si ce n'est par
la doctrine traditionnelle de l'Eglise qui est largement oubliée ou niée non
seulement par les néo -catholiques de l'église conciliaire, mais par tous les
tenants des doctrines libérales qui se
sont installés dans l'Eglise depuis deux siècles. « Omnis potestas
a Deo » ou
bien « Omnis potestas a populo » L'argutie
consiste à fausser le problème en prétendant que cette souveraineté vient
(peut-être ?) de Dieu mais passe nécessairement par le suffrage populaire. Charles Maignen est né en 1858 ; il est le neveu du Père
Maurice Maignen qu'il rejoint, à vingt ans, dans la congrégation des Frères de
Saint-Vincent-de-Paul. Envoyé en 1881 au Séminaire français de Rome, il y
organise une « Conférence »
en liaison avec l'oeuvre des cercles
catholiques d'ouvriers. Il gagne la confiance du supérieur, le Père Eschbach,
qu'il tient au courant des publications concernant les questions sociales. Il est ordonné prêtre à Rome en 1884. Docteur en
théologie, attaché d'abord, à Paris, à l'Association des jeunes ouvriers de
Notre-Dame de Nazareth, il devient en 1886 le premier aumônier de l'A.C.J.F. et
y assume, en outre, la direction
de la section des Etudes. Très
informé de la recherche doctrinale poursuivie à Rome, il propose une «fidélité inventive » dans le domaine
social. Pour garder l'unité et le dynamisme de I'A.C.J.F., Albert
de Mun la soustrait à une dépendance trop étroite de l'épiscopat en
transférant aux Jésuites la charge d'aumônier. Fin décembre 1887, le Père Le
Tallec remplace l'abbé Maignen qui garde la direction des Études. Mais, royaliste, Maignen désapprouve l'adhésion d'A. de
Mun à l'encyclique de Léon XIII sur le Ralliement et il quitte l'A.C.J.F. en
1892. En 1894, il perd sa charge de directeur du Cercle catholique de
Montparnasse, pour avoir soutenu Drumont contre A. de Mun qui avait
appuyé le gouvernement dans le vote des
« lois scélérates ». Après
un passage à l'oeuvre des Orphelins apprentis d'Auteuil, l'abbé Maignen reste
sans fonction précise durant une dizaine
d'années qu'il emploie à combattre les courants novateurs. En 1898, il publie
un livre contre l'américanisme et le Père Hecker
: Le
Père Hecker
est-il
un saint ? Contre la tendance démocrate, le Congrès de Bourges de 1900 et les abbés
Lemire, Birot, Naudet et Dabry, il publie en 1901: `Nationalisme,
catholicisme, révolution. Sur le même sujet, en réponse au livre du P. Maumus : Dans `Nouveau catholicisme et nouveau clergé’, qu'il
publie en 1902, il s'attaque au modernisme. Il s'en prend aux articles d'A.
Firmin (pseudonyme de l'abbé Loisy) parus dans Le premier « détruit l'édifice catholique tout entier,
depuis les fondements jusqu'au faîte, sans en respecter aucune partie et menace la foi des simples ». Charles Maignen estime que « l'esprit nouveau inspire chaque jour des
témérités plus grandes à ceux qui ont
entrepris de rajeunir l'Église en la réconciliant avec le siècle », et il réclame des « exécutions nécessaires »
et des « mesures suprêmes ». Le second ouvrage prouve le dualisme intellectuel de
Loisy, et Maignen montre l'étendue des ravages accomplis déjà dans l'Église.
Pour lui, tous les novateurs ont partie liée, « depuis les Annales de
philosophie chrétienne jusqu'au Sillon en passant par Il attaque aussi Blondel dont le système, dit-il, « altère
ou plutôt détruit la notion du miracle, d'accord avec l'exégèse de M. Loisy qui
vient lui prêter appui et en doubler le danger ». Charles Maignen ne
cessera plus de pourfendre le « nouveau catholicisme » : par là,
il désigne tous les courants qui dérivent du catholicisme libéral et dans
lesquels il discerne la menace d'un schisme. Sous le supériorat du Père Anizan, Charles Maignen
est envoyé à Tournai, à la maison mère de Lorsque
Pie X dépose le P. Anizan, au début de 1914, Maignen est appelé à Rome comme
recteur du scolasticat. En 1917, il est nommé
procureur général de sa Congrégation et qualificateur du Saint-Office. En 1933, Charles Maignen a résumé sa pensée dans `La
doctrine sociale de l'Église d'après les encycliques’. Il meurt en 1937. (D’après M. l’Abbé N. PINAUD dans « Le
Donjon « de février 2004.)
Doctrine des théologiens sur l'origine de la société et du pouvoir civil ‘Suffrage universel — Mensonge
universel’ Pie IX Quelle est l'origine de la société civile ? Avant
de répondre à cette question, il est nécessaire d'en bien préciser le sens, car
l'origine de la société peut être considérée au point de vue de l'histoire ou
au point de vue de la doctrine. C'est
à la philosophie chrétienne, que nous demanderons d'abord de nous répondre et
de nous dire pour quelles raisons il est nécessaire à l'homme de vivre en
société. L'homme,
dit Saint-Thomas d'Aquin(1), ne peut se suffire à lui seul(2). Comment
un individu isolé pourrait-il se procurer
tout ce qui est nécessaire à sa nourriture ?
Comment se préparerait-il des vêtements, des remèdes, un abri ? Comment
fabriquerait-il, en même temps, ses instruments de travail ? Restant
seul, il ne pourrait faire de son temps et de ses forces une part suffisante
pour accorder à l'étude, au travail manuel et aux soins de sa nourriture ce qui
est nécessaire, cependant, pour qu'un homme arrive au complet développement de
ses forces physiques et de ses facultés morales. Il
est vrai que les philosophes du XVIII° siècle
ont prétendu que cet état d'ignorance et d'isolement était l'état naturel de
l'homme ; mais, par une contradiction singulière, ils avouaient que si
l'humanité n'était sortie de cet état de nature, pour se constituer en sociétés, elle eût infailliblement péri. Singulier état de nature, assurément, qui eût mené la nature humaine à sa destruction ! Cet aveu seul peut suffire à prouver la vérité de la thèse
catholique : car l'état naturel d'une créature doit être favorable
à sa conservation et au perfectionnement de ses facultés. Or, cet état, qui favorise la conservation et l'amélioration
de l'espèce humaine, c'est l'état social. Le véritable état
de nature est
donc celui de l'homme vivant en société avec ses semblables. Mais il y a plusieurs sortes de sociétés parmi les hommes. La première, la plus naturelle, la plus nécessaire de
toutes, c'est la famille,
qui fournit à l'homme les premiers secours, et les plus indispensables, à la
conservation et au bien-être de la vie. C'est elle qui,par
le mariage, assure la multiplication du genre humain sur la terre; c'est elle qui procure
à l'enfance les soins multiples qu'exigent la délicatesse de son corps et
l'ignorance de son esprit ; c'est elle qui donne les affections pures et fidèles. Mais elle n'est pas la seule société nécessaire. Ce que
nous avons dit de l'individu isolé peut, dans une certaine proportion,
s'appliquer à la famille, si elle ne trouve dans une société plus étendue et
plus forte le complément dont elle a besoin. Elle aussi ne peut se suffire entièrement à elle-même. Pourra-t-elle, par ses seules ressources, exercer les
industries multiples que suppose un degré convenable d'aisance et de bien-être dans le vêtement, la nourriture et l'habitation ? Ses membres pourront-ils,
à eux seuls, acquérir les connaissances nombreuses et difficiles que suppose
l'exercice convenable de ces différentes industries ? Pourront-ils se livrer à
l'étude des sciences, dans la mesure où elles sont nécessaires au développement normal de l'intelligence ? Enfin seront-ils en mesure de résister à leurs ennemis et de se faire justice eux-mêmes, sans blesser les droits
d'autrui ? Une famille isolée, placée en dehors de toute société, et
n'ayant rien, qu'elle ne doive tirer de ses propres ressources, sera
nécessairement dans une grande indigence des biens dont l'homme a besoin pour
le développement de ses facultés. Ainsi, les familles sont amenées par la nécessité à
s'unir en une société plus parfaite, comme les individus sont poussés par une
nécessité encore plus impérieuse à se grouper
autour d'un foyer. Cette société, appelée à suppléer à l'insuffisance de la
société domestique et à assurer, en même temps, sa conservation et sa
prospérité, dans l'ordre public, est désignée communément par les auteurs sous
le nom de société civile ou société politique ; son origine, sa raison d'être, c'est la loi
naturelle elle-même,
c'est-à-dire Dieu, qui en est la règle et l'auteur. C'est
Dieu qui a fait l'homme, tel qu'il ne puisse
vivre sans l'institution de la famille ; c'est donc Dieu qui est l'auteur de la
famille. C'est Dieu, auteur de la famille qui a fait cette société première
insuffisante par elle-même, en sorte que les familles aient une tendance
naturelle à s'unir pour former la société civile ; Dieu est donc l'auteur de la
société civile. Ainsi,
la cause première de la société civile, c'est Dieu ; sa cause prochaine, c'est
la nature de l'homme, sa cause immédiate, c'est la nature de la famille. Telle
est, en quelques mots, la réponse de la philosophie catholique à notre question
: Quelle est l'origine de la société
civile ? (3) Interrogeons
maintenant l'histoire. Il ne s'agit pas ici de remonter à l'origine de chaque
société civile, de chaque nation, mais seulement à l'origine de la première
société, de celle avant laquelle il n'existait que des familles. L'histoire
des origines de notre race est tout entière contenue dans les premiers
chapitres de Nous
trouvons, dans ces faits, une confirmation éclatante de la doctrine formulée
plus haut. Au
commencement, Dieu crée un seul homme, mais il ajoute bientôt : « Il n'est pas
bon que l'homme soit seul (4) ». Il lui donne une compagne, « adjutorium simile sibi »(5), et la famille est fondée. L'homme
pécha, avant que la famille eût pu donner naissance à une autre société ;
faut-il en conclure que la société civile n'aurait pas existé si Adam eût
persévéré dans l'état d'innocence ? Ce serait trop se hâter de
résoudre une question sur laquelle de
grands théologiens ont des opinions
contraires et qui, d'ailleurs, est indifférente. En
tout cas, il est de fait que la société civile, supposant la pluralité des
familles, n'a pu se former et ne s'est formée, en réalité, qu'après une
certaine propagation du genre humain sur la terre. Toutefois,
la formation de la société fut contemporaine des premiers hommes. Caïn
ne fut pas le seul fils d'Adam qui donnât naissance à une cité, et, avant la fin de sa longue carrière, le père de tous les hommes
put voir des villes nombreuses et florissantes sortir de cette terre que Dieu
lui avait donnée pour être fécondée par son travail. Le fait primordial qui a déterminé la formation des
anciennes sociétés politiques, c'est l'extension et la
multiplication des familles issues d'une même souche, lui restant unies d'abord
par des liens purement domestiques, puis, peu à peu, par des relations d'un
caractère public et juridique. Ensuite,
la conquête, les traités ou le libre consentement de plusieurs, ont servi de
point de départ à la formation d'un grand nombre d'États ; mais la communauté
d'origine reste le fait naturel qui donne naissance aux cités. C'est ce que
Cicéron exprimait ainsi : « Prima
societas in ipso conjugio est, proxima in
liberis, deinde una domus, communia omnia. Id autem est principium urbis
et quasi seminarium reipublicae ». (De Officiis). Ainsi,
la philosophie et l'histoire s'accordent pour affirmer que la société est
voulue et exigée par la nature, et que les théories du Contrat social ne sont pas moins en contradiction avec les faits qu'avec
la raison. Dans
l'Encyclique « Immortale Dei » le Souverain Pontife a résumé la
doctrine catholique : « L'homme, dit-il, est né pour vivre en société, car ne
pouvant dans l'isolement ni se procurer ce qui est utile et nécessaire à la
vie, ni acquérir la perfection de l'esprit et du coeur ; L'enseignement
de l'Église est donc très nettement formulé sur ce point, et les catholiques
ne peuvent hésiter à le suivre. II 1° Nature de la société civile. La société civile est une société naturelle, nécessaire, parfaite et organique. Elle est naturelle, ce qui ne veut pas seulement dire qu'elle est conforme à
la nature de l'homme et que les principes de la raison naturelle suffisent, par
eux-mêmes, à sa constitution et à son fonctionnement ; cela implique encore
que ses lois fondamentales, sa constitution essentielle, sont dictées et
imposées par la nature et qu'il n'est pas loisible à l'homme d'en méconnaître
les principes et d'en violer les prescriptions. De même que, pour la société domestique, l'unité et
l'indissolubilité du lien conjugal sont imposées aux hommes par une volonté
supérieure, de même, pour la société civile, il est des lois qui s'imposent au
législateur lui-même, qu'il n'a pas le pouvoir d'enfreindre, mais qu'il a le devoir
de reconnaître et de sanctionner. Tous les droits et tous les devoirs, même dans l'ordre
civil, ne dérivent donc pas de la loi humaine ; l'État n'en est pas l'auteur et la source ; mais il est des droits
imprescriptibles dont il a le devoir de se faire le protecteur et le gardien.
C'est pourquoi, la proposition suivante a été condamnée dans le Syllabus : La
société civile est, en second lieu, une société nécessaire, c'est-à-dire
qu'elle n'est pas seulement conforme et proportionnée à la nature de l'homme,
mais que cette même nature exige qu'une telle société existe. Ce qui a été dit précédemment sur l'origine de la société civile peut servir à prouver cette nécessité et à en expliquer la nature. L'existence de la
société civile est nécessaire au complet et parfait développement de l'espèce
humaine ; elle n'est pas rigoureusement et directement exigée pour la
conservation de chaque individu et de
chaque famille considérée séparément Nous verrons combien cette remarque est importante
quand nous traiterons du but de la société. La société civile est encore une société parfaite. On désigne, dans l'Ecole,
sous le nom de
société parfaite ou complète celle qui possède, par elle-même, tous les moyens d'atteindre
son but, en sorte qu'elle n'est pas destinée à trouver dans une société
supérieure son complément et sa perfection. C'est ce que le Souverain Pontife a plus brièvement
exprimé dans l'encyclique Immortale
Dei, en rappelant
que l'Église est une société parfaite ; Elle
possède, en soi et par elle-même, toutes les ressources qui sont nécessaires à
son existence et à son action. La société civile répond bien à
cette définition de la société parfaite ; elle possède tous les moyens naturels
de procurer à l'homme la félicité de cette vie, puisqu'elle supplée, en cela,
tout ce qui manque à la société domestique ; et elle n'est pas destinée à faire partie d'une société supérieure de même ordre, puisque nous ne voyons pas,
dans l'ordre naturel, de société à laquelle
elle puisse être subordonnée. Ainsi,
la société civile est justement considérée comme
une société parfaite, et le pouvoir suprême lui appartient dans les choses purement
temporelles. C'est
encore l'enseignement du Saint-Père, dans la
même encyclique ; parlant des deux sociétés, l'Église et l'Etat, il dit : Chacune
d'elles, en son genre, est souveraine. Enfin, la société civile est une société organique, c'est-à-dire
qu'à l'exemple des corps vivants dont les membres ne sont pas animés d'un
mouvement purement mécanique, mais jouissent chacun d'une vie propre, bien que
dépendante de la vie du corps tout entier, la société civile se compose
d'organes dont la vie et la constitution sont distinctes de la sienne, tout en
lui restant subordonnés. Ces organes vitaux de la société civile, ce sont ses
membres, c'est-à-dire les familles, les communes, les provinces : car la
société civile ne se compose pas d'individus, elle se compose de sociétés moindres,
antérieures à elle par leur nature, plus strictement nécessaires et plus
directement instituées de Dieu: Ces sociétés ont leurs droits et leur constitution
propres, que la société civile n'a pas le droit d'altérer ou de
méconnaître, mais qu'elle a le devoir de sauvegarder. La société civile n'est donc pas une collection
d'individus égaux, mais une hiérarchie de sociétés subordonnées, auxquelles les
individus peuvent appartenir à différents titres et dans lesquelles ils
exercent des magistratures et des fonctions en rapport avec leur condition. La
constitution des sociétés modernes est loin de présenter ce caractère ; c'est
là son tort et son malheur. Fondée
pour l'individu, ne connaissant d'autres
droits que les droits individuels et les droits de l'État, cette constitution sociale est fatalement
conduite à osciller entre le libéralisme et le socialisme, pour tomber
enfin dans une complète dissolution. Toute
définition de la société civile qui ne la présente pas comme un corps moral
naturel, nécessaire, complet et hiérarchiquement organisé, doit donc être
rejetée. Mais il n'est pas
possible de connaître la véritable nature et les caractères essentiels de la société civile, si l'on n'en précise nettement le but, la fin. 2°
Fin de la société civile. Il résulte de la constitution organique de la
société civile que sa fin propre et immédiate ne peut être ni le bien
individuel de chaque homme, ni le bien privé de chaque famille, mais le bien
commun des familles et des autres associations qui lui sont subordonnées. Ce bien commun est un bien temporel : car le
bien spirituel est la fin propre de l'Église, et on ne saurait l'assigner
pour but immédiat à la société civile, sans amener entre les deux pouvoirs une
inévitable et funeste confusion ; c'est, de plus, un bien extérieur : car
le bien intérieur, même temporel, de chaque homme est d'ordre individuel et privé, nullement d'ordre social ; enfin, ce
bien temporel que doit procurer l'union des familles en une société parfaite consiste dans l'ordre et la prospérité
publiques. Cet ordre et cette prospérité ne sauraient être limités aux seules conditions matérielles de la vie, et doivent s'étendre à l'ordre moral tout entier ;
en effet, le bonheur de l'homme, même en cette vie, ne consiste pas uniquement,
ni même principalement, dans la satisfaction des exigences du corps ; il
dépend surtout des dispositions intellectuelles
et morales de l'âme ; la société civile ne serait donc pas une société naturelle
et parfaite dans son ordre, ni même une société vraiment humaine,
si elle ne tendait à procurer la félicité temporelle conformément à la nature
de l'homme dans ce qu'il y a en elle de plus élevé et de proprement humain. La société doit donc
pourvoir, par des moyens proportionnés à sa nature, au perfectionnement
intellectuel et moral de l'homme. Si nous voulons embrasser dans
une même définition
toute l'étendue de la fin de la société civile, nous dirons donc : La
société civile a pour but le bien commun temporel de l'homme tout entier,
en tant que ce bien peut être obtenu par les actions
extérieures (7) Ainsi, c'est donner une définition incomplète et tronquée
du but de la société, que de lui assigner la protection des droits et de la
liberté de chacun, ou le maintien de la paix et de la sécurité publiques ; elle
doit tendre à procurer le bien temporel de l'homme dans toute sa plénitude et
son extension, mais seulement dans l'ordre public et en dehors de la
sphère d'action des individus, des familles ou des associations. Ainsi,
le rôle de la société est très étendu : il atteint tout ce qui intéresse le
bonheur et le perfectionnement de l'homme en cette vie, mais les limites en sont très nettement définies, puisque sa raison d'être et sa mission cessent là où
commencent celles de la famille et des autres organes du corps social. Cette conception de la fin de la société civile permet seule de rester à égale
distance entre les deux écueils les plus redoutables en ces matières : le
libéralisme et le socialisme. (1) De
regimine Principum, lib. I, cap. I. (2) :Cf
Charles Maurras — Mes Idées politiques
(3)Taparelli : Essai théorique de Droit naturel ; cardinal Zigliara : Philosophia moralis ; Mgr Cavagnis : Notions de droit public naturel et ecclésiastique. (4) 2. Genèse : Chap. II, v.18. (5) Ibidem. (6)Genèse : Chap. IV, v. 17. (7) Mgr Cavagnis : Notions de Droit public naturel
et ecclésiastique Pie IX Senigalia 13 mai 1792--Rome 7 février 1878
[Accueil][Présentation][Documentation][Galerie][Liens][Contact]
|